Energy recovery : sewage sludge is not waste.
Autriche #Autriche
English version.
The case pits the companies Sappi and Wasserverband against the regional administration of Styria, Austria [1]. The Sappi company operates an industrial plant for the production of paper and cellulose. On the same site, there is a wastewater treatment plant operated by Sappi and Wasserverband, treating urban waste water as well as waste water from the paper and cellulose factory.
This sludge is then burned, in a Sappi boiler as well as in a waste incinerator belonging to Wasserverband. The steam resulting from these combustions is recovered for energy recovery purposes and feeds the production of paper and cellulose.
The companies then modify the boiler and the incinerator, but the regional administration considers that this modification was subject to authorization, because it qualifies burnt sewage sludge as waste. A dispute follows, which led the judge to ask the following preliminary question : should sewage sludge be classified as waste before it is incinerated ?
Remember that Council Directive 2008/98/EC of 19 November 2008 on waste, in its article 2 paragraph 2, that wastewater is excluded from the scope of the waste directive when it is covered by other community provisions. Article 3 defines the term “waste” as “any substance or object which the holder discards or intends or is required to discard ” and the term “recovery“ as “any operation the principal result of which is waste serving a useful purpose by replacing other materials which would otherwise have been used to fulfil a particular function, or waste being prepared to fulfil that function, in the plant or in the wider economy“.
The Court first holds that wastewater is not covered by other Community dispositions, and therefore that it is necessary to apply the waste directive to them.
Then, it recalls its constant jurisprudence : the qualification of “waste” results above all from the behavior of the holder and from the definition of the terms “to discard” [2]. The Court of Justice intends to give a broad definition of “to discard, which must encompass the recovery” and disposal of a substance.
Regarding the behavior of the keeper, the probability of reusing the substance must be considered, with or without transforming operation, by the holder. If there is an economic advantage for the holder to reuse this good, then the probability will be high. Therefore, the substance cannot be considered as something that the holder intends to “discard”, but as a product.
At this stage, it appears that the Court specifies the conditions for the application of article 6 paragraph 1, which states that :
« 1. Certain specified waste shall cease to be waste within the meaning of point 1 of Article 3 when it has undergone a recovery, including recycling, operation and complies with specific criteria to be developed in accordance with the following conditions : (a) the substance or object is commonly used for specific purposes ; (b) a market or demand exists for such a substance or object ; (c) the substance or object fulfils the technical requirements for the specific purposes and meets the existing legislation and standards applicable to products ; and (d) the use of the substance or object will not lead to overall adverse environmental or human health impacts. The criteria shall include limit values for pollutants where necessary and shall take into account any possible adverse environmental effects of the substance or object. It is more particularly points a) and b) which are specified, because the behavior of the holder, subject of the Court’s longest developments in this judgment, mainly concerns the existence of current use of the substances in question, as well as on the satisfaction of a request, eventually by means of a recovery. »
The Court of course mentions that the other two conditions of article 6 paragraph 1 must be fulfilled. However, it recalls that its office is not to verify whether the conditions are met in this case, leaving this work to the trial judges.
The Court answered the asked question, that the sewage sludge produced during the joint treatment of wastewater, intended to be incinerated for energy recovery purposes, is not waste as long as it meets the criteria of article 6 paragraph 1 of the Waste Directive before before its incineration.
Version française.
Le 14 octobre 2020, la Cour de justice de l’Union européenne s’est prononcée sur la qualification des boues d’épuration produites par le traitement commun des eaux incinérées aux fins d’une valorisation énergétique par production de vapeur. Courte analyse de l’arrêt.
L’affaire oppose les sociétés Sappi et Wasserverband à l’administration régionale de Styrie, en Autriche [3]. La société Sappi exploite une installation industrielle de production de papier et de cellulose.
Sur le même site, se trouve une station d’épuration exploitée par Sappi et Wasserverband, traitant les eaux urbaines résiduaires ainsi que les eaux usées issues de l’usine de papier et de cellulose. Lors du traitement des eaux usées, des boues d’épuration sont produites, constituées des substances des eaux urbaines et des eaux usées de l’industrie de papier et de cellulose.
Ces boues sont ensuite brûlées, dans une chaudière de Sappi ainsi que dans un incinérateur de déchets appartenant à Wasserverband. La vapeur résultant de ces combustions est récupérée aux fins de valorisation énergétique et alimente la production de papier et de cellulose.
Les sociétés modifient par la suite la chaudière et l’incinérateur, mais l’administration régionale considère que cette modification était soumise à autorisation, car elle qualifie les boues d’épuration brûlées de déchets. S’en suit un contentieux, qui amène le juge à poser la question préjudicielle suivante : les boues d’épuration doivent-elles être qualifiées de déchets, avant leur incinération ?
Rappelons que la directive 2008/98/CE du 19 novembre 2008 relative aux déchets, dans son article 2 paragraphe 2, que les eaux usées sont exclues du champ d’application de la directive déchet dès lors qu’elles sont couvertes par d’autres dispositions communautaires. L’article 3 définit le terme « déchets » comme « toute substance ou tout objet dont le détenteur se défait ou dont il a l’intention ou l’obligation de se défaire », et le terme « valorisation » par « toute opération dont le résultat principal est que des déchets servent à des fins utiles en remplaçant d’autres matières qui auraient été utilisées à une fin particulière, ou que des déchets soient préparés pour être utilisés à cette fin, dans l’usine ou dans l’ensemble de l’économie ».
La Cour retient d’abord que les eaux usées ne sont pas couvertes par d’autres dispositions communautaires, et donc qu’il est nécessaire de leur appliquer la directive déchet.
Ensuite, elle rappelle sa jurisprudence constante : la qualification de « déchet » résulte avant tout du comportement du détenteur et de la définition des termes « se défaire » [4]. La Cour de justice entend donner une définition large de « se défaire », qui doit englober la « valorisation » et l’élimination d’une substance.
Sur le point du comportement du détenteur, il faut s’intéresser à la probabilité de réutilisation de la substance, avec ou sans opération de transformation, par le détenteur. S’il existe un avantage économique pour le détenteur à réutiliser ce bien, alors la probabilité sera forte. Donc, la substance ne pourra pas être considérée comme une chose dont le détenteur entend « se défaire », mais bien comme un produit.
A ce stade, il apparaît que la Cour précise les conditions d’application de l’article 6 paragraphe 1, qui énonce que :
« 1. Certains déchets cessent d’être des déchets au sens de l’article 3, point 1, lorsqu’ils ont subi une opération de valorisation ou de recyclage et répondent à des critères spécifiques à définir dans le respect des conditions suivantes : a) la substance ou l’objet est couramment utilisé à des fins spécifiques ; b) il existe un marché ou une demande pour une telle substance ou un tel objet ; c) la substance ou l’objet remplit les exigences techniques aux fins spécifiques et respecte la législation et les normes applicables aux produits ; et d) l’utilisation de la substance ou de l’objet n’aura pas d’effets globaux nocifs pour l’environnement ou la santé humaine. Les critères comprennent des valeurs limites pour les polluants, si nécessaire, et tiennent compte de tout effet environnemental préjudiciable éventuel de la substance ou de l’objet. »
C’est plus particulièrement les points a) et b) qui sont précisés, puisque le comportement du détenteur, objet des développements les plus longs de la Cour dans cet arrêt, porte principalement sur l’existence d’un usage courant des substances dont il est question, ainsi que sur la satisfaction d’une demande, éventuellement par le biais d’une valorisation.
La Cour mentionne bien entendu que les deux autres conditions de l’article 6 paragraphe 1 doivent être remplies. Elle rappelle toutefois que son office n’est pas de vérifier si les conditions sont remplies en l’espèce, laissant ce travail aux juges du fond.
La Cour répond à la question posée, que les boues d’épuration produites lors du traitement commun des eaux usées, ayant vocation à être incinérées à des fins de valorisation énergétique, ne sont pas des déchets dès lors qu’elles remplissent les critères de l’article 6 paragraphe 1 de la directive déchet avant leur incinération.